Overblog
Editer l'article Suivre ce blog Administration + Créer mon blog
Le blog de Carole Anne

D'ici et de là, de tout et de rien

La malade imaginaire

Publié le 6 Mars 2010 par Carole Anne

Elle croit qu'elle a peut-être envie de vomir. Elle n'en est pas sûre. Elle tenait néanmoins à me réveiller pour m'avertir de cet état de fait de la plus haute importance. Aujourd'hui, samedi 6 mars à 3h54, l'envie de vomir était peut-être présente hic et nunc.

Soit.

Elle a soigné sa mise en scène. L'oeil est tombant, la bouche aussi, une moue de petite-fille-qui-n'est-pas-bien.

"Je suis pas bien, maman, je ne sais pas, je crois que j'ai peut-être envie de vomir",

Soit.

Je sors du lit, mon dieu, 3h54, je tâtonne jusqu'à la salle-de-bain, trouve les itinerols, descends en trébuchant dans l'escalier et en lâchant quelques gros mots, à la cuisine prendre 2 cuillères à café, écrase avec soin (enfin..) les comprimés, prépare un verre d'eau. B.... 3h58... Mon dieu, mais pourquoi, pourquoi...

  • ai-je fait des enfants - aussi adorables soient-elles
  • sont-elles toujours malades la nuit - et la veille de réunions importantes
  • ne sont-elles jamais malades chez leur père - "Je ne vois pas ce que tu veux dire, elles sont toujours en parfaite santé!"
  • ne puis-je pas dormir quand je le souhaite - Juste quelques heures, je vous en prie, supplie, conjure... je veux juste d-o-r-m-i-r...


Néanmoins, je reste aimable, patiente, tolérante et authentiquement empathique. Carl Rogers (NB : psychothérapeute américain issu du courant humaniste dit "centré sur la personnne") serait fier de moi. Ouaip.

Je lui fourgue le comprimé écrasé dans le bec. Elle esquisse une moue "Ah, maman, c'est beeeeeeerk!".
"Elisa!" dis- je sur mon ton "Attends ma poulette, il est 4h00, alors..."
Elisa a compris. C'est 4h01. L'envie de rire ne m'est pas présente.
L'éventuelle "envie de vomir" a pris le pas sur l'eventualité d'une "envie de rire". CQFD.

"Ca va mieux?", dis-je en bâillant, à 4h02, sitôt le comprimé avalé. Ben oui c'est rapide l'effet de ces trucs-là, non?

"Oui déjà un peu mieux", anone mon aînée, d'une voix monocorde et résignée.

"Biiiiiiiien", continue-je toujours en bâillant, "alors je vais te recoucher".

"J'ai mal à la tête aussi", repond Elisa en se tenant le front, oeil tombant et voix chevrotante.

"Oui", dis-je mécaniquement en tâtonnant dans l'armoire à pharmacie à la recherche de paracétamol ou de n'importe quelle autre substance chimique miraculeuse. Voire illicite. Sincèrement à cette heure-là, je serais prête à  lui donner de l'immodium (pour qu'elle arrête de me faire... oh pardon...) ou du dormicum...

Le sirop dafalgan est là. Collant et impossible à ouvrir, comme à son habitude. S'en est presque touchant. Presque. Je remplis méticuleusement l'éprouvette jusqu'à la ligne "18kg" et hop avalé c'est pesé. Combien de fois ai-je fait ce geste-là??

"Maintenant au lit", dis-je d'un ton sans réplique, "tu es presque guérie."

"Oui Maman", murmure Elisa d'une petite voix cassée, le menton tremblant.

"Je te laisse la lumière allumée dans le couloir ma puce et je te mets un verre d'eau sur ta table de nuit."

"Mets aussi une bassine au pied du lit si jamais", me répond-elle d'une voix monocorde.

"Bien sûr et surtout n'hésite pas à me réveiller si cela ne va pas", poursuis-je sur mon ton le plus doltien - en croisant les doigts derrière mon dos.

4h08. Elle dort. Abrutie de substances pharmaceutiques alors que seuls quelques placebos auraient suffi...

Un baiser, un câlin, un "je t'aime"...

Il faudra en parler à Novartis demain, me dis-je en me recouchant...

Commenter cet article